à lire ci dessous :-), enfin un peu de bon sens?
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Coup de chaud sur les isolants minces
En plein salon Batimat et à moins d'une semaine de l'entrée en application (NDLR : le 1er novembre) de l'arrêté du 3 mai 2007 relatif aux caractéristiques thermiques et à la performance énergétique des bâtiments existants, la Direction Générale de l'Urbanisme, de l'Habitat et de la Construction, qui pilote l'élaboration des réglementations thermiques des bâtiments a décidé de clarifier les règles à appliquer pour respecter la réglementation concernant l'utilisation des isolants dans les bâtiments. Au détriment des produits minces réfléchissants.
Pour appliquer cet arrêté, ainsi que la Réglementation Thermique 2005 applicable à la construction neuve, la réglementation prescrit que le pouvoir isolant des produits de construction est caractérisé par la résistance thermique R (exprimée en mètre carrés degrés Kelvin/Watt). Dans son communiqué, le ministère enfonce le clou en expliquant que "seule cette résistance thermique R doit être utilisée pour l'application de la réglementation de manière à garantir aux occupants la performance qu'ils sont en droit d'attendre".
En ligne de mire : les isolants minces
Cette prise de parole officielle vise en particulier certains fabricants d'isolants minces réfléchissants qui, selon le Centre Technique et Scientifique du Bâtiment (CSTB), "annoncent des performances plus élevées que celles qu'il conviendrait d'attribuer à leur produit, sans aucune justification probante".
Ces isolants minces réfléchissants sont des complexes de faible épaisseur composés d’un assemblage de films réflecteurs et de séparateurs associés (ouates, mousses, etc…). Ils ont pour fonction de réfléchir le rayonnement thermique : c’est le principe la couverture de survie appliqué à l’isolation de la maison.
Une interprétation de la réglementation
La société Actis, leader du secteur, ne se reconnait pas dans la fameuse RT 2005 étendue à la rénovation. "Cet arrêté fait référence notamment aux règles Th-U et Th-bât qui prévoient pour les isolants minces réflecteurs (dénommés produits réfléchissants) des valeurs thermiques par défaut. Ces valeurs par défaut ne reflètent cependant pas la réalité des performances de ces matériaux car elles ont été définies à partir des normes existantes sur l'isolation, conçues à l'origine pour les isolants épais traditionnels" explique Actis.
Se basant sur le texte de l'arrêté qui n'évoque pas une obligation mais une possibilité ("Les valeurs par défaut données par les règles Th-U et Th-bât peuvent également être utilisées pour calculer la résistance de la paroi existante" selon l'arrêté), l'industriel est même allé plus loin en indiquant dans un communiqué que "les professionnels ne sont pas tenus d'appliquer ces valeurs si le fabricant est en mesure de prouver la pertinence des valeurs thermiques qu'il affiche pour ses produits".
C'est effectivement le cas pour Actis qui déclare "qu'à efficacité thermique équivalente, les isolants minces multicouches réflecteurs permettent la mise en place de dispositifs d’isolation 3 à 5 fois plus minces (lames d’air incluses) que les isolants épais traditionnels". Une affirmation qui repose sur des tests réalisés in situ. "En situation réelle, les modes de transferts d’énergie (conduction, convection, rayonnement,…) sont complexes et s’opèrent naturellement de manière simultanée. Les mesures in situ permettent de les apprécier dans la globalité" justifie Actis qui s'appuie sur l'expertise des centres techniques anglais (BM Trada) et allemand (Fraunhofer Institut für Bautechnik).
Une bataille de scientifiques
En France, ces mesures in situ ne convainquent pas du tout le CSTB qui a réalisé spécialement avec le Centre Energétique et Procédés de l'Ecole des Mines une étude sur les méthodes d'évaluation des produits réfléchissants. Financée par l'ADEME dans le cadre du PREBAT (Programme de recherche sur l'énergie dans le bâtiment), cette étude démontre "qu'en période froide, et dans des conditions les plus favorables, la résistance thermique maximale d'un produit mince réfléchissant courant de 2 cm d'épaisseur avec deux lames d'air adjacentes, ne peux pas dépasser 2 m2.K/W".
La plupart des fabricants d'isolants minces ont vivement réagi à la publication de cette étude en octobre dernier, leur syndicat professionnel (le SFIRMM) allant même jusqu'à dénoncer "l'absence de rigueur scientifique du protocole d'essai".
Nouvelle donne
Devant un tel flou scientifique, le ministère a donc souhaité clarifier la donne en imposant le seul critère de résistance thermique R.
Celui-ci se détermine soit conformément à la norme européenne, soit dans le cadre d'un Agrément Technique Européen ou d'un Avis Technique. "A ce jour, huit produits de cette nature ont fait l’objet d’un Avis Technique. Pour deux de ces produits, un Agrément Technique Européen est en cours d’instruction en vue de leur marquage CE" explique Salem Farkh, ingénieur thermique de l'enveloppe du bâtiment au CSTB.
Pour les autres produits, il est fait obligatoirement application des valeurs, fonction de l'épaisseur de l'isolant et de sa nature, définies dans les règles ThBat auxquelles les textes réglementaires et en particulier l'arrêté du 3 mai fait référence explique la DGHUC. "Toute autre méthode d'évaluation de la résistance thermique d'un produit isolant n'est pas acceptable et n'est pas acceptée, car elle ne garantit pas de réelles économies d'énergies" conclut le communiqué de la DGHUC.
Un véritable coup dur pour la plupart des fabricants d'isolants minces réfléchissants. Car en ne répondent plus à la réglementation, leurs produits ne donnent plus droit au crédit d'impôt.
Jean-Philippe Defawe
(08/11/2007)